Ali Berrada : le grand voyage intérieur
Ali Berrada fait partie de ces Ness Lioum de la première heure, de ceux avec qui on a grandi, aiguisé notre regard, et choisi d'en faire quelque chose. Aujourd'hui photographe de voyage, professeur de yoga et surfeur à ses heures, il semble avoir trouvé sa voie, au croisement de l'art et de la spiritualité. Sa nouvelle exposition "Spiritualités 111", à la Galerie des Tours Végétales de Casablanca, retrace justement son parcours en proposant une rétrospective de ses photographies prises au Nepal, au Sri Lanka, en Inde, au Japon, en Turquie et au Maroc. On rembobine et on vous raconte toute l'histoire.
"111 a une symbolique spirituelle, c'est le nombre de l'unicité. Le 1 tout seul n’existe pas, il a besoin d’autre chose pour exister."
Le travail de Ali est fait de patience, d'intuition, et d'Amour. "Spiritualités 111" raconte justement ses rencontres avec des gens du monde entier, de traditions et de cultures différentes depuis qu'il a choisi en 2014 de faire du voyage son mode de vie. Cette recherche d'altérité est venue nourrir un fort besoin d'introspection latent qui l'a conduit à partir d'abord 6 mois en Asie, en commençant par le Népal, puis l'Inde. Avant cela, il y avait déjà eu deux grands voyages structurants dans son parcours. En 2009, alors qu'il découvre le Japon, il achète son tout premier vrai appareil et rêve de photographier une geisha. Quelques temps plus tard, National Geographic lui achète un de ses cliché, un signe qui lui prouve que la photo n'est pas qu'une lubie. Fast Forward en 2013, Ali se rend à Konya, lieu de pèlerinage universel où est enterré le maître spirituel sufi et poète Rûmî qu'il étudie depuis quelques temps déjà. "J'étais bouleversé de trouver des Japonais pleurer devant la tombe de Rûmî." En décembre 2017, il retourne à Konya dans le cadre du festival qui célèbre la mort du maître spirituel. Il le raconte comme sa plus belle expérience, dans une ville "où les gens dansent et chantent, quelques soient leurs origines et convictions, ils ont pour dénominateur commun l'Amour, la bonté et la bienveillance." Il réalise alors une vidéo lors d'une cérémonie sama, concert spirituel des derviches tourneurs soufis de l'ordre de Mevlevi. Le mouvement des derviches, la main droite levée au ciel invoquant la grâce divine, et la gauche tournée vers la terre, est posé sur le morceau « In this world » de Moby qui répète « Lord don’t leave me all by myself ». Une façon pour l'artiste de croiser ses différents univers et de le rendre plus accessible, mais aussi de rappeler "que l'Islam peut être dans l'Amour".
Loin de faire du prosélytisme, Ali cherche simplement à délivrer sa vision du monde qui, pleine de grâce, se traduit dans ses photos par une certaine maîtrise de la lumière, toujours douce, des couleurs, vibrantes, et des mouvements, pris comme au ralenti.
Naturellement, le Maroc reste pour le photographe une grande source d'inspiration : "j’ai beaucoup voyagé hors des sentiers battus et j'ai rencontré des personnes formidables spirituellement. Dès qu’on sort un peu des grandes villes, on découvre une démarche et une vision complètement différentes de ce que l'on connait du Maroc."
Out beyond ideas of wrongdoing and rightdoing, there is a field. I will meet you there.
- RUMI
Le 6 juin, Ali inaugure une nouvelle exposition de son projet "Yoga Stah" à l'Institut Français. En collaboration avec la professeur de yoga Tamara Tufani, ces sessions de yoga perchées permettaient d'appréhender Casa d’une manière complètement différente, de quitter la ville d'une certaine marnière, en prenant de la hauteur. L'exposition proposera une restitution de l'expérience en images, mais aussi des ateliers, rencontres, et cours de yoga.